Tikographie, Sensibiliser les jeunes à l’impact du numérique

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A Saint-Germain-Lembron, la médiathèque et le collège se sont associés pour travailler avec les jeunes éco-délégués sur l’impact des smartphones sur l’environnement. Quelques graines de prise de conscience qui ne demandent qu’à germer…


 « On ne dirait pas qu’un tout petit objet comme ça représente autant d’énergie ! », s’exclame Hugo, qui a été particulièrement frappé par ces quelques chiffres : « avec nos téléphones portables, en une heure, on fait tourner l’équivalent de plusieurs centrales nucléaires. Ou des allers-retours Paris New-York… On nous parle beaucoup de l’impact de l’avion, mais le numérique, on ne se rend pas compte ! »


Avec Lorik, il a pris en charge le travail sur « la consommation énergétique de nos pratiques numériques ». Et les deux collégiens mettent du cœur à transmettre ce qui les a interpellés et même effarés. Ils exposent leurs réflexions sur les gestes à adopter pour réduire cette débauche d’énergie : « il faut utiliser son portable le moins possible. Les jeux, les réseaux sociaux… ça ne sert pas vraiment. »


« On nous parle beaucoup de l’impact de l’avion, mais le numérique, on ne se rend pas compte ! »



Hugo, éco-délégué



Noah et Maël, eux, sont les responsables du sujet de la fabrication des appareils. En sixième, ils manient déjà avec aisance les concepts d’impact, de ressources vitales, d’écosystèmes… Ils déroulent les nuisances causées par l’industrie du numérique, sans oublier les impacts sociaux, qu’ils ont choisi de mettre en avant avec le chiffre de « 40 000 enfants qui travaillent dans les mines ». Eux aussi ont réfléchi à des solutions : « Il faut garder son téléphone le plus longtemps possible, le donner à recycler quand on le change, choisir un téléphone durable ou reconditionné ».


Chaque volet du sujet de l’impact du smartphone est détaillé dans un poster presque aussi grand que ses concepteurs. Deux autres panneaux sont consacrés au recyclage des téléphones, aux aspects très matériels d’internet – câbles, data centers. Avec des chiffres qui impressionnent, des infographies simples et claires, des informations sur les impacts environnementaux et des recommandations pour agir.

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Maël et Noah ont travaillé sur les impacts de la fabrication des téléphones, en réfléchissant aussi aux gestes qui permettraient de réduire ces nuisances.


L’ensemble de ces grands panneaux sur fond bleu ciel constitue l’exposition « Mon téléphone, la planète et moi… » Elle a été créée par les jeunes éco-délégués du collège de Liziniat à Saint-Germain-Lembron, Ceux de cette année scolaire, mais aussi, avant eux, ceux de l’année dernière, qui ont défriché le sujet et recueilli les premières informations.


Ce projet a été monté à l’initiative de la Licorne, médiathèque et tiers-lieu de la commune, qui accueille régulièrement des élèves du collège et a eu envie d’initier un travail de sensibilisation avec eux. « Nous avons choisi le smartphone en partant du principe que c’est l’outil numérique qu’on utilise le plus et les adolescents aussi. L’exposition reflète les informations qu’ils voulaient faire passer, qu’ils estiment les plus importantes », explique Maïna Malassigné, responsable du projet à la Licorne.


« C’est l’outil numérique qu’on utilise le plus et les adolescents aussi. »

Maïna Malassigné, responsable du projet à la Licorne



L’équipe du tiers-lieu a travaillé en étroite collaboration avec Sophie Lacoste, la conseillère principale d’éducation du collège, qui est entrée dans la proposition avec enthousiasme. « Cela correspond aux valeurs du collège et aux miennes en particulier, et les enfants ont facilement accroché. Ils n’attendent que d’avoir un espace pour s’intéresser à ces sujets environnementaux, auxquels ils sont très sensibles », explique-t-elle, ajoutant avoir eu aussi « un super groupe » l’an dernier pour le démarrage du projet.


Réflexion et bidouillage


Les ateliers se sont déroulés « entre midi et deux », seul créneau où les collégiens pouvaient se rendre disponibles. Et le travail a été d’autant plus intéressant pour eux qu’il s’accompagnait de propositions attrayantes pour y entrer.


Ils ont visionné un documentaire sur la « pollution numérique ». Il y a eu surtout le vélo bidouillé avec la complicité du collectif billomois L’Obrador du Madet, pour comprendre qu’une batterie de téléphone ou d’ordinateur se remplace et se recharge, soit de façon classique, soit… en pédalant façon vélo d’appartement : une demi-heure d’effort pour recharger 2 % de son smartphone. Ce qui laisse le temps de bien réfléchir à l’usage que l’on va en faire !

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Maïna Malassigné explique le travail réalisé autour du vélo : « Les fabricants font en sorte que les batteries des téléphones ne soient pas accessibles, mais en fait, ce sont des piles qu’on peut recharger. Le vélo permet de prendre conscience de l’énergie nécessaire », détaille-t-elle.


« L’an dernier nous avons pu inclure dans l’atelier quelques élèves en décrochage et ils se sont bien impliqués, notamment grâce à cette partie manuelle de démontage de batterie », explique la CPE. Elle reconnaît que tous « partaient de loin sur les notions d’impact du numérique ; mais ils ont les bases sur l’usage du portable et ils se sont donné beaucoup de mal pour faire avancer le projet. »


Lauréat du budget éco-citoyen du conseil départemental, le projet a pu financer aussi la « traduction » des recherches du groupe en posters très graphiques, faciles à comprendre et proprement imprimés. Quatre panneaux d’information rigoureusement vérifiée, puis deux derniers pour faire phosphorer les visiteurs et les engager à agir, invités à enrichir l’exposition de leurs propres suggestions sur les bons gestes à adopter.


Leçons aux adultes


Mercredi, c’était le vernissage de l’exposition, dans la salle polyvalente de l’école. La directrice, le conseiller départemental, beaucoup de parents sont venus écouter la leçon des jeunes et leurs judicieux conseils. Par exemple, une des collégiennes a fait découvrir à la majorité des adultes présents où trouver et surveiller son temps d’utilisation dans les paramètres de son smartphone. Deux autres ont testé le niveau de conscientisation de l’assistance avec un petit quiz sur quelques ordres de grandeur : équivalent en kilomètres de voiture du visionnage mondial de streaming, émissions de gaz à effet de serre des data centers, etc.

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Les collégiens ont soumis aux adultes présents les questions de leur quiz. Avec même quelques pièges, comme la question de savoir s’il vaut mieux pour l’environnement transmettre les questions du quiz par mail ou imprimé sur papier…


Les parents se sont montrés intéressés, reconnaissant volontiers, pour certains, qu’ils avaient aussi des efforts à faire en ce domaine. Et ravis de pouvoir partager avec les initiatrices du projet la mission de sensibiliser leurs enfants aux bienfaits de la vie hors écrans interposés.

Quant à savoir si le projet aura eu une influence sur l’utilisation des téléphones par les élèves concernés, Hugo et Lorik disent avoir commencé à faire davantage d’activités à l’extérieur et à réduire leur temps passé le nez collé sur l’écran. « Sauf pour la mécanique, c’est ma passion », reconnaît Lorik.


« C’est difficile de changer ça parce que l’usage du portable est très ancré dans leur génération. "

Sophie Lacoste, CPE


Sophie Lacoste reste plus dubitative sur le temps d’écran au quotidien : « C’est difficile de changer ça parce que l’usage du portable est très ancré dans leur génération, mais ils feront sans doute plus facilement des efforts pour faire durer leur portable ou le faire réparer ; et ils pourront changer peu à peu, car ils ont pris conscience du problème. »


Transmettre à d’autres collèges

Après cette première présentation, des pistes sont déjà en cours pour faire vivre l’exposition. D’abord dans le collège : « peut-être au moment de l’accueil des CM2 aux portes ouvertes en fin d’année, ou à la rentrée, pour que les élèves qui ont participé transmettent ce qu’ils ont appris avant la passation aux prochains éco-délégués », imagine la CPE. Et une réflexion est déjà en cours pour implanter dans l’établissement un point de collecte des téléphones pour les orienter vers le recyclage.

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Parents, équipe pédagogique, élus… Pour une fois, ce sont les adultes qui ont écouté et appris. Ici ils se font expliquer par Lorik et Hugo (à gauche) la consommation énergétique impressionnante des pratiques numériques.


Du côté de la Licorne, les regards se tournent vers les autres collèges du département, afin de faire circuler l’exposition et faire partager à d’autres élèves le travail de leurs pairs. Le Conseil départemental pourra faciliter cette transmission, et notamment Fabien Besseyre, l’élu du canton ; car il était présent à l’inauguration, et a bien retenu de sa conversation avec les jeunes que « renvoyer juste ‘ok’ en réponse à un mail équivaut à la consommation d’une lampe allumée pendant 24 heures ».

« J’ai retenu que renvoyer juste ‘ok’ en réponse à un mail équivaut à la consommation d’une lampe allumée pendant 24 heures. » 

Fabien Besseyre, conseiller départemental



En attendant, Maël, Noah, Lorik, Hugo et leurs copains et copines vous laissent méditer sur ces quelques données : saviez-vous par exemple que 78,2% des composants de votre smartphone sont recyclables ? Que 350 000 mobiles sont jetés chaque jour en France ? Que les datacenters (en 2021) ont émis autant de gaz à effet de serre que le trafic aérien ?

Comme s’est exclamé un père d’élève en découvrant la présentation des éco-délégués : « Ah oui, quand même ! »



Reportage Marie-Pierre Demarty – texte et photos – réalisé le 14 février 2024 à l’occasion de l’inauguration du projet

Photo de une : les éco-délégués, avec les équipes de la Licorne et du collège, et le conseiller départemental du canton, devant les panneaux de l’exposition.


Pour lire le contenu du projet qui a reçu le soutien financier du Département du Puy-de-Dôme avec le Budget Ecologique Citoyen, cliquez ici